Cette photo figure sur le passeport de ma mère
à coté de la sienne.
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Dans les années 50,
c'était une formalité obligatoire pour aller en Italie.
A cette époque,
ma grand mère maternelle était déjà atteinte par la maladie de Parkinson
et la charge d'une personne dépendante était devenue bien trop lourde pour mon pépé.
Ce fut en grande partie la cause de notre retour à Marseille en 1953,
après quatre années passées à Sète.
Ma mère désirait être auprès de la sienne.
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Cet été là, nous devions tous partir en Italie.
Pour mes grands parents maternels c'était un retour vers leurs racines.
Pour mon petit frère et moi
c'était la première fois !
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Maman décida donc de m'emmener chez le photographe
pour faire la photo du nouveau passeport .
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je n'aimais pas cela !
Prendre la pose , sourire à la commande,
ne me convenait guère.
Et puis cela aurait sans doute été un moindre mal,
si comme d'habitude,
lorsque je sortais en promenade avec maman
j'avais pu emmener mon poupon Alain.
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Ce jour là, catégorique,
ma mère refusa jugeant sans doute Alain trop encombrant.
Vexée, je ruminais en silence tout le long du chemin
quelle pourrait être ma vengeance.
Une idée ne tarda pas à me sourire !
J'allais saboter la photo...
Je n'aurai qu'à attendre l' instant bref
ou le photographe, caché derrière sa grosse boite noire, me dirait
" Fais moi un joli sourire , le petit oiseau va sortir !"
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_Savourant cette idée avec une certaine jubilation
Je présenterai ainsi à la postérité,
à l'instant fatidique ou le flash jaillirait de la drôle de machine,
le portrait inédit de ce que ma mère nommait
ma " Mauvaise tête ".
Pinçant les lèvres de toutes mes forces
afin de n'esquisser aucun sourire,
j'offris à ce moment là au photographe
le visage de ma revanche.
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Quelques jours plus tard
maman revint brandissant la photo,
sans doute amusée par ce portrait insolite,
me prévint gentiment.
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_"Nicole !
nous retournerons demain chez le photographe.
tu vois ! cette photo je vais la garder ,et lorsque tu seras une grande fille ,
je la montrerai à ton fiancé.
je la montrerai à ton fiancé.
Comme cela il aura un aperçu du spécimen qu'il va prendre "
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Mais peu m'importait
cette menace ne me préoccupait guère!
j'aimais mille fois plus mon poupon Alain...
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Le lendemain,
nous sommes reparties toutes deux chez le photographe
Alain cette fois nous a accompagné.
La seconde photo fut faite et le photographe obtint ce jour là mon plus beau sourire
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Ce qu'il advint de la photo ?
Ma mère l'a rangée soigneusement dans un coffret.
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Bénéficiant sans doute
de l'indulgence maternelle,
je n'eus jamais à rougir devant un futur prétendant
de mon évidente mauvaise humeur.
Maman,
Maman,
L'avait elle vraiment oubliée ?
ou bien s'était elle souvenue qu'à dix ans
elle aussi était la championne
de tous les concours de grimaces de son quartier.
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Hier, lorsque je l'ai retrouvée
au milieu de toutes les photos de famille
sur mon visage s'est dessiné
un sourire amusé empreint d'une indéfinissable nostalgie...
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3 commentaires:
moi j'ai failli m'étouffer tellement j'ai ri.
sacré nicole !
je faisais dans le même genre, mais celle-là je n'y aurai pas pensé !
Pa ta te est té tue.
c'est écrit à la page 8 de la méthode Boscher ...
je suis ravie de voir que tu as appris à lire !
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