mardi 31 mars 2009

Nicole | Le Passeport.

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NICOLE
Cette photo figure sur le passeport de ma mère
à coté de la sienne.
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Dans les années 50,
c'était une formalité obligatoire pour aller en Italie.
A cette époque,
ma grand mère maternelle était déjà atteinte par la maladie de Parkinson
et la charge d'une personne dépendante était devenue bien trop lourde pour mon pépé.
Ce fut en grande partie la cause de notre retour à Marseille en 1953,
après quatre années passées à Sète.
Ma mère désirait  être auprès de la sienne.
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Cet été là, nous devions tous partir en Italie.
Pour mes grands parents maternels c'était un retour vers leurs racines.
Pour mon petit frère et moi
c'était la première fois !
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Maman décida donc de m'emmener chez le photographe
pour faire la photo du nouveau passeport .
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je n'aimais pas cela !
Prendre la pose , sourire à la commande,
ne me convenait guère.
Et puis cela aurait sans doute été un moindre mal,
si comme d'habitude,
lorsque je sortais en promenade avec maman
j'avais pu emmener mon poupon Alain.
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Ce jour là, catégorique,
ma mère refusa jugeant sans doute  Alain trop encombrant. 
Vexée, je ruminais  en silence tout le long du chemin
quelle pourrait  être ma vengeance.
Une idée ne tarda pas à me sourire !
J'allais saboter la photo...
Je n'aurai qu'à attendre l' instant bref
ou le photographe, caché derrière sa grosse boite noire, me dirait
" Fais moi  un joli sourire , le petit oiseau va sortir !"
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_Savourant cette idée avec une  certaine  jubilation 
Je présenterai ainsi  à la postérité,
à l'instant fatidique ou le flash jaillirait de la drôle de machine,
le portrait inédit de ce que ma mère nommait
ma " Mauvaise tête ".
Pinçant les lèvres  de toutes mes forces 
afin de n'esquisser aucun  sourire,
j'offris à ce moment là  au photographe
le visage de ma revanche.
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Quelques jours plus tard
maman revint  brandissant  la photo,
sans doute amusée par ce portrait insolite,
me prévint gentiment.
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_"Nicole !
 nous retournerons demain  chez le photographe.
 tu vois ! cette photo je vais la garder ,et  lorsque tu seras une  grande fille ,
je la montrerai à ton fiancé.
Comme cela il aura un aperçu du spécimen qu'il va prendre  "
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Mais peu m'importait 
cette menace ne me préoccupait guère!
j'aimais mille fois plus mon poupon Alain...
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Le lendemain,
nous sommes reparties toutes deux chez le photographe
Alain cette fois nous a accompagné.
La seconde photo fut  faite et le photographe obtint ce jour là  mon plus beau sourire 

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Ce qu'il advint de la photo ?
Ma mère l'a rangée soigneusement dans un coffret.
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Bénéficiant sans doute
de  l'indulgence maternelle,
je n'eus jamais à rougir devant un futur prétendant
de mon évidente mauvaise humeur.
Maman,
L'avait elle vraiment oubliée ?
ou bien s'était elle souvenue qu'à dix ans
elle  aussi était la championne
de tous les concours de grimaces de son quartier.
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Hier, lorsque je l'ai retrouvée
au milieu de toutes les photos de famille
sur mon visage s'est dessiné
un sourire amusé empreint d'une indéfinissable  nostalgie...
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3 commentaires:

Anonyme a dit…

moi j'ai failli m'étouffer tellement j'ai ri.
sacré nicole !
je faisais dans le même genre, mais celle-là je n'y aurai pas pensé !

Anonyme a dit…

Pa ta te est té tue.
c'est écrit à la page 8 de la méthode Boscher ...

Anonyme a dit…

je suis ravie de voir que tu as appris à lire !