jeudi 24 décembre 2009

Nicole| Rêverie de Noël







Ce soir , j'ai  fait un rêve étrange .
 j'ai dix ans.

Dehors le ciel est gris, il fait très froid.
C'est Noël!
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Hier soir,  mon frère et moi
avons déposés nos souliers sous l'étagère  en marbre de la salle à manger,
à l'endroit ou la crèche est posée.

Les petits santons descendent gaiement la colline de papier froissé,
la rivière coule, les ailes du moulin virevoltent.

Je ne crois plus au Père Noël depuis longtemps mais je continue de faire semblant.
Peut être bien qu'à force de l' imaginer, il va finir par exister,
comme tous  les personnages de mes livres.
Dans la rue  des milliers de guirlandes scintillent.
Aujourd'hui c'est la fête!

Dans quelques heures toute la famille sera réunie.
Je suis heureuse.
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Des airs connus   se bousculent  dans ma tête 
avant de venir échouer sur mes lèvres
"C'est la belle nuit de Noël
la neige étend son manteau blanc
et les yeux levés vers le ciel
à genoux les petits enfants."
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Je chante et  voila que  dans le ciel  noir les étoiles s'illuminent
 les unes après les autres.
Je lève la tête à la recherche de la plus grande , la plus belle,
celle que j'ai délicatement posée au dessus de l'étable
"l'Etoile du Berger. "
Elle est là !
 Je la  regarde et soudain  mille ans s'effacent.


_Je ne connais pas encore la misère,
 la solitude, le désespoir, le manque d'amour.
Que pour certains Noel puisse être un jour triste malgré les lumières qui scintillent,
je ne peux encore l'imaginer.

Pourtant tout cela je le sais déjà 
 Maman me l'a dit.
Mais je n'ai que  dix ans, et l'ais je vraiment bien compris
moi qui ne connais pas grand chose de la vie.

Impatiente,
J'attends le nez collé contre la vitre ,
faisant des ronds de buée à la fenêtre de la cuisine,
l'arrivée de grand Papa , grand Maman,
Pépé, Manou , Tatie Toinette et Tatie Jeanne.
pépé,
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Soudain,  je les aperçois   et mon cœur  bat la chamade.
Ils ont les bras chargés de cadeaux.
Au  travers des mailles du" filet" que porte au poignet ma grand mère,
il me semble entrevoir un paquet au reflet argenté.
 Les battements de mon cœur s'accélèrent.
Je ferme les yeux.
  j'essaye  pour la  dernière fois de deviner si notre lettre au Père Noël a bien été lue.
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Dans la maison ça sent bon.
La table est déjà dressée.
Maman prépare un bon repas .
Papa chante en cirant ses chaussures.
Nous sommes heureux, mais nous ne le savons pas encore !

Comment imaginer lorsqu'on a dix ans que le rêve est souvent plus court que prévu.
Qu'un jour toutes ces lumières s'éteindront les unes après les autres.

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Ce sont les plus Anciens  qui  partiront les premiers.
Sans doute pour montrer le chemin.
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Je n'ose même pas imaginer avec quelle douleur
Maman nous a quittés   un si beau jour d'été .
six jours seulement avant leur  50 ans  de mariage.

Quelques années après, c'est Papa qui est parti la rejoindre,
Sans doute l'attendait elle  parée  de sa plus belle robe.



Aujourd'hui,
Les lampions de la fête sont toujours là.
Les guirlandes brillent encore de tous leurs éclats.
Et les petits santons qui descendent lentement la colline de papier froissé
ont toujours le même regard paisible.
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Les grands parents arrivent encore au petit matin  les bras chargés de présents et
les enfants impatients les attendent toujours derrière les fenêtres
en faisant des ronds de buée sur les vitres glacées .
__Mais les guirlandes ne brilleront plus jamais de la même façon
pour tous ceux qui sont devenus 
" Orphelins de leur enfance."
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En cette veille de Noël puis- je encore
griffonner sur une page de mon vieux cahier d'écolière,
un petit mot que je glisserais sans faire de bruit,
 dans les souliers de mes parents au coté des nôtres.

"Papa , Maman ,
ce n'est pas seulement votre absence qui m'est intolérable
mais la longueur de cette absence ."
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En ce soir de Noël et  malgré tous les coups bas que la vie  nous réserve,
J'aimerai  savourer encore une fois ,
comme je le faisais  hier, avec les gâteaux de riz de ma grand mère,
ces quelques brins de bonheur qui nous sont distribués,
et qu'au lever du jour nous trouvons déposés
 dans nos petits souliers.
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Car tout est fragile et éphémère.
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Joyeux Noël à tous.

Nicole

















8 commentaires:

Anonyme a dit…

Ce texte m'a émue aux larmes.
Le passage de la petite fille à l'adulte se fait de façon imperceptible.
J'aime ta façon d'écrire, tranquile, qui coule simplement comme ça vient. Rien n'est travaillé, tu ne cherches pas à provoquer sourires, rires ou larmes.
Merci pour la plus belle lettre sur Noël que j'ai jamais lue.

reth a dit…

que du bonheur, à ce moment là, tout était fait pour nous protéger.
souvent, c'était les grand-parents
qui nous faisaientt rencontrer le deuil...nous étions mis au courant, plus tard, après une longue préparation.
pour le jour de l'A, nous prenions le bus pour rendre visite à chaque membre de la famille pour présenter les voeux, nous adorions.Nous avions des étrennes et un petit verre à liqueur de crême de cacao, un délice.

sur les traces de notre enfance a dit…

C'est fait!
Mais ce n'était pas bien grâve...
Merci pour votre commentaire.
Effectivement au jour de l'An nous faisions le tour de la famille pour avoir des étrennes et c'était un plaisir immense car avec les quelques sous que nous récoltions nous pouvions compléter notre liste de jouets que nous n'avions pas pu avoir à Noël.
A bientôt ! Ce sera toujours un grand plaisir de vous lire et encore merci de l'intêret que vous portez à notre blog.
Nicole.

Anonyme a dit…

Jolie histoire d'hier racontée avec beaucoup d'émotion ça se sent. J'espère que vous gardez ces récits en dehors du blog, pour la postérité.
à bientôt
manouedith

sur les traces de notre enfance a dit…

Les années passent, nos visages n'ont plus la même lumière , nos rides se creusent mais dans nos coeurs sommeille toujours cet enfant du passé.

Cette petite fille qui croyait que ses parents étaient immortels...

Merci pour votre commentaire
Nicole

Parthenia a dit…

Quel magnifique texte, si plein de douceur et d'émotions et d'amour... et si intemporel... Il parle en chacun de nous parce que nous avons tous ce lien si particulier qui nous unie à nos parents.
Enfants, on les pense immortels, puis c'est la déchirure quand nous prenons conscience, assez jeune, qu'ils nous quitteront un jour pour toujours... Mais au fond de nous, on les veut toujours invincibles...
J'ai atteint un peu plus de la moitié de ma vie (si j'en crois les statistiques ! ^^), et j'ai la chance d'avoir toujours mes deux parents... mais je sens le temps se raccourcir impitoyablement !
Bref, je ne pleure que très rarement mais ton texte m'a amené les larmes aux yeux !

Nathalie a dit…

Magnifique... L'enfant est devenue une adulte qui m'a émue aux larmes. Les épreuves de la vie font que Noël n'a parfois plus la même saveur qu'autrefois, lorsque l'on grandit. Et pourtant, la tradition se perpétue, parce qu'on la perpétue pour que d'autres enfants puissent, à leur tour, vivre son rêve et sa magie.
Ce texte est vraiment superbe.

Sur les traces de notre enfance a dit…

Les pages se tournent les unes après les autres et puis un jour le livre se refermera , il restera certainement quelques traces de nos petits pas.

Ce texte je l'ai écrit un soir de Noel avec des larmes pleins les yeux mais il est aussi chargé d'espoir . Il ne faut pas pleurer car la vie continue il faut juste saisir l'instant merveilleux qu'elle nous offre chaque jour en cadeau dans nos petits souliers.

"Nous étions heureux mais nous ne le savions pas encore .."
c'est cela la magie de l'enfance.

Aujourd'hui je sais!

Merci Nathalie